« L’esprit de compétition doit être présent de la première à la dernière minute »

Le statut de favori de Comblain et le duel à distance avec Neufchâteau, la charge mentale d’une série victorieuse, les qualités indispensable pour devenir un bon entraineur, sa relation avec Marc Hawley, les messages essentiels à distiller à une équipe, la manière de construire une équipe qui gagne, les principes fondamentaux du succès et ceux sur lesquels il est interdit de transiger et les ingrédients indispensables pour réussir une saison de basket-ball: autant de sujets évoqués avec Ludo Humblet dans un grand entretien axé coaching.

Ludo, beaucoup d’observateurs pointent Comblain comme favori en TDM2B suite à vos résultats, le jeu que vous proposez et l’effectif que vous alignez mais Neufchâteau aussi est invaincu et Pierrick Van Den Brule estime cette équipe encore plus redoutable que la vôtre. Partages-tu cette analyse ?

Une saison, c’est long et je pars du principe qu’il faut respecter toutes les équipes du championnat. Qui sommes-nous pour affirmer qu’une équipe est plus redoutable qu’une autre ? Il y a tellement d’éléments et de paramètres qui entrent en ligne de compte et pour lesquels nous ne sommes pas maîtres. Personnellement, j’estime que des équipes comme Tongres, Aarschot et Geel – pour ne citer qu’elles – sont également extrêmement redoutables. Ces formations ont eu des blessés, un calendrier compliqué et des déplacements difficiles. Avant de tirer des conclusions hâtives ou des analyses trop définitives, il est primordial de garder en tête que c’est à la fin du bal qu’on paie les musiciens. Comme je dis toujours à mes joueurs: concentrez-vous sur votre assiette, ce serait déjà pas mal. Cependant, il est clair que les analyses du pivot de Spa et de certains de ses coéquipiers sont assez pertinentes et guère éloignées de la réalité. Les Chestrolais disposent d’aussi belles individualités que les nôtres mais jouent ensemble depuis trois ans ou plus. Ils possèdent le même coach, le même groupe, les mêmes systèmes. Cela change pas mal de choses.

Avant la mise sur pause de la TDM2B, vous deviez justement affronter Neufchâteau.

Une saison ne se joue pas sur un match et et la force d’une équipe ne s’évalue pas sur une seule rencontre. Mes joueurs et moi-même avons un plan bien spécifique en tête. Actuellement – touchons du bois – les choses se passent plutôt bien pour nous. Le résultat du match à Neufchâteau ne fait pas du tout partie de notre plan pour cette saison, nous sommes donc super relax. Nous nous méfions de toutes les équipes et, notamment de la belle équipe de Spa chez qui nous nous étions imposés difficilement en ne jouant pas notre meilleur basket. D’ailleurs, à la lecture des analyses de Van Den Brule et Franck, tous mes joueurs ont bien compris qu’ils n’avaient pas mis assez d’intensité dans leur jeu contre les Bobelins. J’espère qu’il auront à coeur de corriger cela au match retour pour ne plus se faire peur et rester dans notre plan de saison.

Néanmoins, comment te positionnes-tu par rapport aux Chestrolais ? En quoi cette équipe de Neufchâteau et la tienne se ressemblent et se différencient ?

Marc Hawley (ndlr: le coach de Neufchâteau) est un très bon ami, il a fait partie des témoins de mon mariage et m’a coaché pendant trois ans. Je connais par coeur sa philosophie et ses qualités. Je n’ai pas honte de dire que mes philosophies de coaching et de travail sont pas mal inspirées de ce que j’ai vécu dans les saisons disputées avec Marc. Je pense donc que nos deux équipes ont énormément de ressemblances à plusieurs niveaux: small ball, intensité, agressivité offensive et défensive, esprit de groupe, etc. La seule différence – et elle est énorme – est que Marc travaille depuis trois ans avec le même groupe. La cohésion actuelle des Chestrolais sur le terrain est bien en avance par rapport à la nôtre.

Comment conserver intacte la motivation d’une équipe qui enchaine les victoires ? Faut-il particulièrement insister sur la concentration ?

Il faut tout simplement travailler très dur à chaque entrainement et ne rien laisser passer aux joueurs. Il faut une concurrence saine dans le groupe. A chaque entrainement, les gars doivent se battre pour leur temps de jeu mais, surtout, pour la réussite de leurs objectifs communs. Ils doivent comprendre que rien n’est jamais acquis. Certains vont tester ou lâcher prise à certains moment, il ne faut pas louper ces moments-là.

En tant que coach, quels messages estimes-tu indispensables à faire passer ? Quels sont les principes sur lesquels tu ne transiges jamais ?

Se donner à fond à 10000% à l’entrainement comme en match. L’esprit de compétition doit être présent de la première à la dernière minute. Les joueurs ne peuvent accepter de perdre un simple petit exercice de shoot. En toute humilité, j’essaie avec mes moyens de toujours leur demander un très gros degré de concentration sur toutes les différentes petites règles. Cela ne doit pas toujours être facile pour eux.

D’ailleurs, pour toi, quelles sont les qualités nécessaires pour être un bon entraineur ?

Le souci du détail, l’anticipation, la rigueur, l’ouverture d’esprit, l’analyse, la remise en question et la passion sont fondamentaux. Même si le coach n’est pas sur le terrain, les joueurs doivent sentir qu’il est prêt à tout donner pour eux, à aller à la guerre pour eux. Personne ne peut s’en prendre aux joueurs de ton équipe et il faut vouloir gagner par dessus tout – ce qui provoque parfois quelque petits excès (rires). Si le coach agit ainsi, alors ses joueurs feront exactement pareil pour lui et de belles choses pourront survenir. De mon côté, je crois que ma petite particularité est d’avoir deux visages totalement différents. Le premier est celui du coach assez dur et rigoureux lors des entrainements et des matchs. Le second est hors du terrain, où j’enlève toutes les barrières entre mes joueurs et moi. Je suis alors leur ami qui s’amuse avec eux et qui partage énormément de choses avec eux en dehors du basket. Un dernier aspect me semble indispensable pour réussir dans le coaching: la réactivité. Il est très important d’être très réactif. En tant que coach, il faut avoir une bonne analyse des éléments qui coincent et pouvoir proposer très rapidement une solution à nos joueurs. Lors de chaque match, je pars du principe que je me trouve dans une partie d’échecs contre l’autre entraineur. C’est aussi cela qui est passionnant dans notre job.

Et enfin, quels sont les ingrédients indispensables pour réussir une bonne saison de basket-ball ?

Il faut tout d’abord un bon recrutement. Pour cela, il faut analyser pas mal de paramètres complètement extérieurs au « touch Basket-ball »: attitude, éducation, sérieux, compétitivité, caractère, sensibilité aux blessures, abnégation, collectivité, courage… La deuxième étape, lorsque l’équipe est finalisée, c’est de créer une grosse cohésion extra-sportive entre tous les joueurs, le staff et tous les membres du club. Il faut qu’une famille se forge afin que tous se battent les uns pour les autres. Ensuite, il faut une philosophie commune de travail avec des règles bien établies que chacun respecte dès le premier jour. Et enfin, peu importe la manière pour y arriver, il faut se débrouiller pour que les joueurs s’amusent, aient envie de venir au basket et soient prêts à mourir sur le terrain, peu importe l’adversaire et le contexte.

Crédit photo: Ludo Humblet