« Vivre mon rêve d’enfant d’une autre façon »

Comme joueur et comme entraineur de jeunes, Zlatan Hadzismajlovic a connu de nombreux clubs en Province de Liège. Ayant débuté sa carrière de kiné au Spirou Charleroi, l’ancien Pepin officie désormais à la JL Bourg, le club qui brille outre-Quiévrain. Entretien fleuve avec un passionné.

Zlatan, à 36 ans, tu es déjà un fameux voyageur.

Je suis originaire de Yougoslavie mais j’ai vécu à Liège à partir de mes dix ans. Actuellement, j’habite en France et je suis kinésithérapeute à la JL Bourg.

Quel a été ton parcours basket ?

J’ai commencé en pupilles à Sainte Walburge puis, en cadets, je suis parti un an à Esneux avant d’intégrer le Centre de formation Pierre Raskin. Souvent, avec Alija Kabangu, nous nous disons que ce sont nos plus belles années basket. C’était dur: nous prenions le train tous les jours de Liège, parfois nous montions à pied jusqu’à la salle (ndlr: le Hall du Paire), et nous rentrions chez nous vers 21 heures ou 22 heures. Mais nous adorions ça, nous nous amusions tellement en travaillant dur et nous progressions ! Nous avons aussi eu le privilège d’être entrainés par de grands coachs comme Bavcevic, Skelin, Polet, Steffens… Au final, je suis resté sept ans à Pepinster.

Par la suite, tu as pas mal bougé.

Oui, je suis allé à Wanze, Avernas-Hannut, Ninane, Esneux, Aywaille, Dison-Andrimont avec Thierry Carton – un super souvenir, vraiment, le plus beau en seniors – et Haneffe. J’ai aussi entrainé à Liège Basket, Haneffe et SFX. A la fin, j’ai vraiment pris goût au coaching et c’est peut-être le fait d’entrainer des jeunes et de leur transmettre ma passion qui me manque le plus désormais.

Qu’aimes-tu particulièrement dans ce sport ?

Etonnamment, c’est la discipline de travail. J’étais plus un joueur d’entrainements (rires). J’apprécie aussi qu’un match puisse basculer à tout moment et qu’on ne puisse pas tricher, il faut se donner à 200% sur le terrain.

Quels sont tes meilleurs souvenirs liés au basket ?

Il y en a tellement… C’est difficile de choisir ! En premier lieu, cela reste les rencontres avec des gars – Alija Kabangu, Maxime De Zeeuw, Christophe Beghin,… – qui sont devenus comme ma famille. Mes années à Pepinster demeurent d’excellents souvenirs, surtout quand l’équipe première s’est hissée en finale des Playoffs. C’était incroyable ! Nous nous entrainions parfois avec les pros mais nous étions aussi leurs supporters. Ah, le chaudron pepin ! Mon année à Dison-Andrimont est aussi un très bon souvenir. Nous avions un super groupe, une super ambiance et un super coach ! Et comme coach, je me souviens lorsque nous avons gagné la Coupe de la Province en minimes avec Liège. Mais je garde aussi de très bons souvenirs de ma dernière année à Liège et à SFX.

Quand as-tu décidé de te diriger vers des études et une carrière de kiné sportif, et pourquoi ?

Au départ, je voulais faire préparateur physique. Dès le départ, je voulais bosser dans le milieu pro… Quand j’ai fini mes études d’éducation physique, j’estimais ne pas posséder assez de savoirs pour bosser au haut niveau, il me fallait soit faire un master en éducation physique, soit une passerelle en kiné. Un de mes professeurs m’a conseillé d’opter pour la seconde option et quand j’ai commencé, je me suis vraiment dit que c’était bien ça que je voulais faire ! Ce qui est ironique, c’est que j’ai vraiment galéré à faire mon année passerelle en kiné mais je n’ai pas lâché l’affaire et j’ai réussi.

Comment expliques-tu que de nombreux basketteurs se tournent vers des études et une carrière de kiné ?

Je pense que c’est lié à la relation qu’ils ont pu créer avec leur kiné. Vous avez déjà eu un kiné qui n’était pas sympa (rires) ? Et puis, cela se rapproche beaucoup du sport et on peut, comme moi qui me considère comme un joueur raté, vivre son rêve d’enfant d’une autre façon (rires).

Tu as travaillé comme kiné au Spirou. Que retiens-tu de ton expérience à Charleroi ?

C’est au Spirou que je me suis lancé dans le monde professionnel. Ce fut une très belle expérience. Je connaissais déjà un peu le club car j’y avais effectué un stage en dernière année avec Peter Sempels, le meilleur en Belgique.

« Etre une meilleure personne que celle que j’étais hier »

Comment as-tu atterri à Bourg-en-Bresse ?

J’avais vu une annonce sur Facebook. A l’époque, j’avais déjà engagé les négociations avec Charleroi pour prolonger là-bas mais, par curiosité, j’ai envoyé un e-mail au kiné de Bourg-en-Bresse en incluant mon CV. Très franchement, quand j’ai envoyé ce mail, je n’avais aucune intention de postuler, c’était juste de la curiosité ! Je savais toutefois que je désirais vivre une expérience à l’étranger mais pas forcément dans l’immédiat. Ce qui a tout changé, c’est l’intérêt que le kiné de la JL Bourg portait à mon CV et surtout un e-mail qu’il a reçu du GM de Charleroi après une défaite contre Limburg lors de la dernière journée de championnat. J’ai effectué un aller-retour en une journée pour visiter les installations et rencontrer le docteur et le manager du club et j’ai eu de très belles impressions.

Qu’est-ce qui te plaît dans ton club qui est véritablement le club qui monte depuis quelques saisons en Jeep Elite ?

Le professionnalisme ! J’aime la structure du club, le fait de toujours chercher à aller de l’avant et à progresser. C’est un peu ma philosophie aussi: être une meilleure personne que celle que j’étais hier. J’apprécie également la relation que j’ai créée avec le « doc » Jean-Paul Delvaux qui est très compétent dans le domaine sportif mais aussi celles établies avec les autres membres du staff. Enfin, nos installations sont, avec celles de l’ASVEL qui sont peut-être mieux maintenant avec l’Académie de Tony Parker, les meilleures de France.

Comment décrirais-tu ton rôle ?

J’essaie de prendre soin de la santé des joueurs de manière préventive mais aussi de les aider à revenir le plus tôt possible sur le terrain lorsqu’ils sont blessés. Je passe beaucoup de temps avec eux, une vraie relation se crée. Je suis aussi un peu leur confident.

Quels sont tes défis au quotidien ?

Prendre soin des joueurs et soigner leurs petits bobos pour éviter qu’ils ne se blessent plus gravement. A l’heure actuelle, c’est surtout axé sur le bien-être des joueurs afin qu’ils se sentent bien, qu’il n’y ait pas de nouvelles blessures à déplorer. Il y a peu, nous avons enchainé deux semaines en déplacement. Nous étions partis le lundi à Venise pour deux matchs sur place avant de revenir en France le vendredi soir et de repartir pour Kazan le dimanche. Il faut donc être vigilant.

En quoi le Covid impacte-t-il ton métier ?

Cela peut paraitre surprenant mais je ne ressens pas trop l’impact du virus. Nous avons la chance de jouer (ndlr: et de briller) en Coupe d’Europe, nous enchainons donc les entrainements et les matchs. C’est vrai qu’il y a bien les tests PCR… Depuis le mois d’août, je dois bien en avoir passés une cinquantaine ! Il nous est arrivé de devoir en subir trois par semaine car nous avons eu des cas – onze, joueurs et staff compris – positifs. A ce moment-là, pendant deux semaines, ce fut compliqué car nous étions à l’arrêt mais, en même temps, nous devions nous occuper des joueurs contaminés. Mais loin de moi l’idée de me plaindre ! J’ai la chance de faire ce que j’aime et je pense à ceux qui sont à l’arrêt ou qui ont perdu leur boulot. Même pendant le premier confinement je suis resté assez positif. J’ai directement pensé à mes parents qui sont restés presque trois ans enfermés le plus possible dans notre appartement de Sarajevo, pas à cause du Covid mais pour éviter de se prendre une balle. Je me disais donc que j’avais de la chance !

« Toutes les étoiles sont alignées ! »

Comment expliques-tu l’ascension et la réussite de ton club ?

A mon sens, cela s’explique par différents facteurs. Le Président et les commerciaux gèrent assez bien le budget. Nous sommes un des rares club en France qui a vu son budget augmenter par rapport à la saison précédente. Ils regardent le présent mais se projettent aussi dans l’avenir avec, notamment, la construction du 1055, un espace de loisirs et restauration à côté de la salle. Il y a aussi le Directeur Sportif, Frédéric Sarre (ndlr: ex-coach emblématique de la JL Bourg), qui est un bosseur comme je n’en avais jamais vu. Il m’impressionne à ce niveau-là ! Et puis, le plus important, le coach Savo Vucevic (ndlr: ex-coach du Spirou Charleroi). Il a réussi, avec Fred Sarre, à créer une vraie équipe et, surtout, à transmettre son savoir et sa philosophie aux joueurs. Les joueurs ont évidemment un rôle majeur dans le succès de l’équipe. Zach Peacock, MVP de ProB puis de ProA. C’est un gars qui, selon moi, pourrait facilement évoluer en Euroleague. Danilo Andjusic est juste incroyable – allez voir la vidéo de son dernier tir contre Levallois cette saison, vous comprendrez ! – et Zach Wright qui est important sur le terrain en en dehors. Nous pouvons aussi compter sur Kadeem Allen, un ancien joueur NBA qui monte en puissance et des Français – Maxime Courby et Pierre Pelos – qui seraient des leaders dans d’autres clubs. Enfin, il y a le jeune Hugo Benitez qui finira en Euroleague, c’est certain. Et puis, il y a aussi le reste du staff qui accomplit parfaitement ses missions. On va dire que, pour nous, toutes les étoiles sont alignées !

Selon toi, quelles sont les différences majeures entre le basket français et le basket belge ?

Il y en a plusieurs comme le nombre d’équipes qui composent la Jeep Elite, le fait que celle-ci ne soit pas une ligue fermée et que toutes les équipes soient compétitives. La médiatisation du basket est également supérieure. Il y a quand même deux matchs par semaine – même pendant le confinement – de Jeep Elite qui sont retransmis à la télévision. C’était quand la dernière fois qu’on a pu voir des matchs en Belgique à la TV ? Je pense que le championnat belge a perdu de son intérêt avec ses formules et cela se voit par le nombre décroissant de supporters qui viennent dans les salles… Et, pourtant, les Belges aiment le basket !

Quelles sont tes envies pour la suite de ta carrière ?

Pour le moment, je suis vraiment heureux ici. J’ai une vie de rêve ! La saison passée, j’ai refusé un poste de responsable médical de la NBA Academy car je suis vraiment bien à Bourg-en-Bresse. Je me donne encore deux saisons et, ensuite, je vais m’obliger à chercher un nouveau challenge. Je me dis que pour évoluer, il faut changer d’environnement après cinq ans et sortir de sa zone de confort. Je cherche toujours à progresser, je fais d’ailleurs des études d’ostéopathie, juste pour acquérir de nouvelles connaissances.

Quel est ton but ultime ?

Ce n’est pas orignial mais l’Euroleague et la NBA, ce sont des choses auxquelles je pense parfois.