LBJ, aussi exceptionnel que grotesque

Cette nuit, LeBron James a livré une prestation exceptionnelle pour son retour à Cleveland. Mais les 46 points et les paniers décisifs du King furent en partie éclipsés par une attitude franchement ridicule. Une constante chez le quadruple MVP dont l’incontestable talent est trop souvent terni par un comportement détestable.

« Rien n’est plus grotesque que le tragique » écrivait Samuel Beckett. Le dramaturge anglais ne connaissait pas LeBron James…

Nul sportif n’a sans doute autant marqué la ville de Cleveland que LeBron James, enfant chéri d’Akron ayant disputé 5 Finals avec les Cavs et qui a ramené le titre à une ville qui en était privé, dans les différents sports majeurs, depuis plus de cinquante ans.

Drafté par les Cavs, LeBron James a pu grandir dans cette franchise qu’il a rapidement emmenée en Finals malgré un effectif limité. Peu en verve lors de ces Finals, LBJ s’était, à l’instar de ses coéquipiers, écroulé face à des Spurs dominateurs d’un Tony Parker MVP.

Le « King » décidait ensuite, selon ses propres termes, « d’exporter (ses) talents à South Beach ». Une annonce faite au cours d’une émission TV surréaliste qui passait mal auprès des habitants de Cleveland et de l’état pivot de l’Ohio. Dan Gilbert, le proprio de la franchise, se fendait d’une lettre incendiaire et des tonnes de fans des Cavs brûlaient le maillot de leur idole en le vouant aux gémonies.

Cleveland, Miami, Cleveland, Los Angeles: James a la bougeotte

Après quatre ans à Miami marqué par deux titres, un gros « choke » en Finals en 2011 contre Dallas et une rouste contre la magnifique équipe des Spurs, LeBron James décidait de revenir sur « ses » terres. Les Cavs ne lésinaient pas sur les moyens pour attirer leur ancienne vedette et envoyait leur first pick (Wiggins) à Minneapolis en échange de Kevin Love, formant ainsi le « Big Three » (avec Kyrie Irving) réclamé par celui qui, depuis le lycée et un papier d’ESPN, s’autoproclame « The Choosen One ».

En quatre ans, les Cavs parvinrent à se hisser quatre fois en Finals, profitant ainsi de la faiblesse de la Conférence Est à l’époque. Et, si les Cavs se sont inclinés trois fois contre l’une des meilleures équipe de l’Histoire, ils sont aussi parvenus à remporter un titre historique en revenant d’un très mal engagé 3-1. Au cours de ces quatre années, LeBron James – particulièrement productif grâce à un jeu entièrement axé sur lui et un noyau bâti en ce sens – n’a cessé de mettre la pression sur ses dirigeants en ne signant que des contrats courts et en exigeant que ses potes (Thompson, Smith) soient payés grassement. Il a constamment exigé du renfort qu’il a toujours obtenu, Cleveland bradant son futur pour satisfaire le présent de sa star. A l’époque, Cleveland avait tout simplement la plus grosse masse salariale de la NBA !

Ensuite, sentant le vent tourner et comme les Cavs étaient exsangues, n’ayant plus les moyens de payer 60 millions par an en luxury tax, toujours à la poursuite de celui qu’il nomme « le fantôme de Chicago », James, qui assure avoir compris après son titre de 2016 être le G.O.A.T. (sic), décidait de rejoindre la Californie et les mythiques Lakers. La première saison du quadruple MVP dans la Cité des Anges ne fut pas une franche réussite, les Angelinos loupaient les Playoffs et vivaient une grosse crise interne. Le front office décidait de satisfaire les exigences de James en envoyant ses jeunes prometteurs pour récupérer de bons vétérans et pour attirer Anthony Davis. Avec le succès que l’on connait; un titre dans la « bulle » d’Orlando après une saison tronquée et face à un Heat décimé.

Des comportements détestables

Cette nuit, LeBron James était de retour à Cleveland et a réalisé une performance phénoménale avec 46 points, 8 rebonds et 6 passes. Adroit de loin (7 sur 11), LBJ a planté des paniers décisifs pour offrir la victoire à L.A. 108-115. Aussi talentueux soit-il sur le terrain par son jeu, James a aussi le don d’agacer par son attitude. Ne parlons même pas ici de sa détestable habitude de contester chaque coup de sifflet et de pleurnicher auprès des arbitres ou des signifier son mécontentement lorsque son équipe encaisse un panier alors qu’il est rarement irréprochable dans ce secteur. Non, cette nuit, c’est par ses regards appuyés vers le banc, le staff et le front office des Cavs ainsi que cette morgue affichée que LeBron James s’est tristement signalé. Une attitude difficilement compréhensible tant les Cavs ont fait leur maximum pour satisfaire à l’époque les exigences – « donnez moi un p***** de playmaker » alors que James ne voulait pas partager la gonfle hormis pour des assists – parfois excessives de leur vedette.

Comme sa propension à modifier la réalité des évènements pour coller à se propre vision de lui-même et de son « œuvre », son manque total d’humilité et son incessant story telling pour que les plus jeunes deviennent persuadés qu’il est plus fort que Michael Jordan, LeBron James a parfois le don d’éclipser son phénoménal talent par une attitude détestable.

Thiebaut Colot